Deux jours après avoir rendu les clés de ma Mustang, il est temps d’écrire quelques lignes sur ce petit cheval venu d’Amérique. Les souvenirs sont encore clairs, les impressions aussi, et il faut battre le fer tant qu’il est chaud. Trois jours et 1400 bornes avec une voiture permettent d’en avoir une idée claire. Du moins je l’espère.
La Mustang est née aux Etats-Unis en avril 1964, sous l’impulsion géniale, il faut l’avouer, d’un Lee Iacocca bien inspiré. L’idée était simple : produire une voiture de sport accessible (notamment pour les jeunes), rentable (elle dérivait de la Falcon, châssis comme moteurs), séduisante (sa ligne inimitable en fait encore rêver plus d’un), et personnalisable (la liste d’options était longue comme le bras). Avec la Mustang, Ford inventait la « Pony car », créneau dans lequel tous les constructeurs américains s’engouffreront à la poursuite du petit poney sauvage : Chevrolet Camaro, Plymtouth Barracuda, Dodge Charger, ou Pontiac Firebird, entre autres.
Ce petit point très rapide d’histoire permet de mieux comprendre la Mustang d’aujourd’hui, et de la prendre pour ce qu’elle est : il ne s’agit pas d’une voiture de luxe, ni d’une grande sportive, mais bel et bien d’une voiture plaisir accessible à tous, distillant un parfum d’Amérique envoûtant. Et pour la première fois, Ford en a fait une voiture mondiale en l’important en Europe et en France en particulier. Fini les importations parallèles, les spécialistes des américaines sur les bords de nationales et les conteneurs au Havre, il suffit aujourd’hui de se rendre à la concession du coin pour commander sa Mustang.
Dès 1974 et la Mustang II, Ford s’était un peu perdu question design, enchaînant les lignes ratées, à mille lieux des premières « stang » devenues mythique, et ce n’est qu’avec la Mustang V en 2004 que la FoMoCo rectifiait le tir : il aura fallu plus de 30 ans pour retrouver un dessin intéressant et rappelant le modèle originel sans en être une copie. La Mustang VI, lancée en 2014 (soit 50 ans après la Mustang I), perpétue cette tradition retrouvée avec une ligne évocatrice qui ne rentre pas dans le néo-rétro tout en étant immédiatement reconnaissable sur la route.
C’est l’un des points forts de cette nouvelle Mustang : elle attire les regards et la sympathie, et même le béotien reconnaît immédiatement une Mustang. Pas besoin de logo Ford (il n’y en a qu’un seul sur le pare-brise, cachant le rétroviseur disgrâcieux), le petit poney sur la calandre suffit largement ! Et sur le port de Saint Gilles Croix de Vie, où nous rejoignions les participants du 5ème Rallye Vendée Classic, nos trois Mustangs alignées comme à la parade attiraient la foule bien plus que les Ferrari, Alpine ou Maserati pourtant plus chères, plus puissantes ou plus exclusives. Les mariés du jour se photographiaient à ses cotés, les enfants demandaient à monter dedans, et les passionnés de bagnoles imploraient pour que l’on mette le contact et qu’on entende enfin le son rauque du V8 de 5 litres. Déjà depuis Paris nos « Stangs » avaient attiré les regards, engagé les conversations et déclenché les photos, du papy en Xsara à la pompiste de la station service demandant à monter dedans.
Sans même vous parler du moteur, de la tenue de route ou de la finition, vous avez déjà un aperçu de la vie qui vous attend en Mustang : tout le monde voudra être votre meilleur copain, ce que peu de voitures suscitent d’habitude. Fidèle à sa tradition, Ford offre de quoi satisfaire tout le monde : coupé fastback ou cabriolet, BVA 6 vitesses ou BM 6 vitesses aussi, 4 cylindres 2.3 Ecoboost (317 ch) ou V8 5 litres (421 ch), le choix est large et correspond aux exigences de uns et des autres. Aux Etats-Unis, il existe même une version V6 3.7 de 300 chevaux en entrée de gamme, pour ceux qui pensent qu’un 4 cylindres n’a rien à faire sous le capot d’une Mustang.
Il est vrai qu’une américaine se conçoit avec un gros moteur, et le V8 sera le choix premier des vrais amateurs d’américaines en général et de Mustang en particulier. Mais l’Ecoboost reste relativement puissant tout en consommant moins, un tarif plus doux de près de 8000 euros, et avec un malus moindre : en cela il est tout à fait adapté aux habitudes européennes. Moins lourd que le V8, il permet des performances similaires grâce à son gain de poids, et vous fera moins mal à la pompe (cela dit, sur l’ensemble du trajet, l’Ecoboost n’a consommé en moyenne que 3 litres de moins aux 100 km que le V8, ce qui est finalement négligeable, avec respectivement 10,3 litres et 13 litres).
Il n’y a pas que du côté des moteurs qu’on a européanisé la Mustang. Je m’attendais tout de même, vus les 4,80 mètres de l’engin, à avoir la sensation de conduire un paquebot. De même, je m’apprêtais à découvrir des suspensions « à l’américaine » telle une chaloupe à la dérive. En fait rien de tout cela, la Mustang se conduit d’un doigt, et ne prends pas de roulis en virage. J’ai eu beau prendre les ronds points en mode warrior, rien n’y aura fait, j’ai toujours gardé le cap. En revanche, sur le mouillé, le mode « pluie » peut-être utile (mais pas très rigolo) pour éviter de tortiller du cul au moment ou la puissance du V8 en particulier arrive sur les roues arrières. J’avoue avoir déconnecter cette aide plusieurs fois pour faire joujou, car malgré tout la Mustang reste tout à fait contrôlable sur sol mouillé si l’on appuie pas comme un bourrin sur le champignon.
A l’intérieur, ne cherchez pas le grand luxe et la qualité d’une européenne dite « premium » : si l’équipement est particulièrement complet, avec de beaux fauteuils en cuir, réglables électriquement, et chauffant, la Mustang reste une voiture accessible de grande série, avec tout ce que cela comporte comme matériaux basiques. Là encore, il faut s’enlever de la tête les comparaisons possible car à ce prix là, on ne peut pas demander du Connolly et de la ronce de noyer ! De toute façon, à son bord, on s’en fiche un peu, car l’essentiel est ailleurs. Décapoté, à allure modérée, on profite du glouglou du V8, de l’air marin, et du regard béat des passants : l’American Way of Life au cœur de la Vendée.
Pour ce qui est de la ligne de ce modèle, certains regretteront les phares ronds, mais globalement, cette nouvelle Mustang respecte les codes imposés par le modèle 1964 1/5, et particulièrement les feux arrières formés de trois stries de biais. Moins agressive que le modèle précédent, elle est plus féminine (d’ailleurs, les femmes l’adorent toutes) tout en restant musclée : un excellent compromis dans la lignée des premiers modèles.

Le gadget qui ne sert à rien mais fait toujours rire: les rétroviseurs projettent un Mustang au sol la nuit à l’ouverture des portières !
D’ailleurs les chiffres de vente ne trompent pas sur la justesse de ce nouvel opus de la Stang. Sans atteindre le record historique de 1966 avec 607 568 exemplaires vendus cette année là, la Mustang VI s’avère être un vrai succès, avec 68 290 exemplaires vendus aux States pour les 6 premiers mois de 2015. En Europe, fin 2015, Ford avait déjà vendu 10 000 véhicules, dont 1000 en France en à peine 100 jours de commercialisation. Autant dire qu’elle s’annonce prometteuse et que 2016 devrait la voir s’imposer dans les charts américains ou européens. C’est à se demander pourquoi Ford n’avait jamais voulu importer officiellement les générations précédentes.
Vous l’aurez compris, je suis assez charmé par cette voiture peu banale. Peu importe ses défauts tant elle distille de plaisirs différents. On trouvera toujours mieux fini, mieux construit, ou plus performant ailleurs, et il y aura toujours des esprits chagrins pour critiquer, mais cette Mustang est une vraie Mustang, incomparable et surtout imbattable côté tarif, avec un rapport prix/plaisir imbattable. Pour m’assurer que je n’étais pas inconsciemment vendu à Ford, j’ai fait le tour des blogs ou sites automobiles pour vérifier : ouf, tout le monde semble d’accord sur ce point, l’éthique est sauve !
Personnellement, si je devais m’offrir une Stang, ce serait en V8, car c’est avec une grosse cylindrée atmosphérique que je conçois une pony car. Et finalement, ce gros moteur ne consomme pas beaucoup plus que le V6 3 litres de ma Saab, ou que le 4 cylindres Ecoboost, preuve des progrès réalisés aujourd’hui. Le son est inimitable (même si je le trouve un poil trop discret), et l’Ecoboost paraît fade à côté (il est beaucoup plus linéaire en accélération, tout en poussant tout de même fort). N’étant pas un homme d’argent, au diable l’avarice, « quand on est au bal, c’est pour danser » !
Pour un petit rappel des différents modèles de Mustang depuis 1964, n’hésitez pas à lire aussi : Ford Mustang VI, un héritage bien géré
19 Comments
Paul,
Merci pour votre reportage qui donne envie de glouglouter en V8 ricain convertible; Par contre avec le toit ouvert en ce moment, ça risque de glouglouter aussi dans les chaussettes…
Ahahah c’est sûr que pour ce mois d’hiver, le cabriolet n’est pas l’idéal… mais l’été va arriver… dans deux mois ! 😉
Parait que depuis la COP21 il faut dire :
« En mai fait ce qu’il te pleut ! »
🙂
Une voiture comme les allemands et les italiens ne savent plus en faire : un moteur, un vrai, avec des piston de la taille d’une (grosse) boîte de conserve et un minimum de tôle autour pour un résultat qui affole les sens.
En plus elle tient désormais bien la route, elle n’a pas le poids et la consommation d’un camion et elle ne coûte pas trop cher. Que demande le peuple, hein ?
Pour l’avoir vue de très près et en détail, je confirme que la qualité de fabrication et de présentation n’a rien de ridicule.
Mais il y a toujours ce complexe maladif de la voiture allemande, qui la fait regarder avec un sourire en coin.
Bon, on va attendre qu’elle décôte un max. Une qualité de plus, d’un certain point de vue…
je vois ton commentaire avec beaucoup de retard (mea culpa) mais je suis d’accord, les américaines n’on plus rien à envier aux allemandes, et c’est sans doute pour cela que Ford importe enfin sa Mustang en Europe ! Yahooo ! Honnêtement, et Ford ne ma paie pas puisque je dois même payer une prune chopée pendant ce trajet, cette Mustang mérite le détour pour qui est prêt àpayer le prix (le malus fait mal au cul) qui n’est pas énorme par rapport à la concurrence à plus de 400 ch 😉
Rouler à la cool decapoté avec la boîte automatique pour pas s’embeter …. Il y a rien de mieux …. j’adore sa…
J’ai eu la chance d’accompagner Paul durant ce road-trip. Je confirme que rouler coude à la portière, cheveux aux vents, la boîte sur « Drive » tout en étant bercé par le glouglou du V8 qui ronronne à 1.500 tours… C’est le pied ! 😀
Super article … En lisant le paragraphe sur l’attrait qu’elle procure chez les gens, je me suis interrogé, pourquoi les gens là préfèrent aux Ferrari …
Et finalement le reste de l’article m’a aidé à comprendre. Je pense simplement que c’est une histoire d’argent. Une Ferrari, c’est elitiste, les gens osent pas la toucher, s’en approcher, parler au proprio … Alors qu’une mustang, ça vaut pas beaucoup plus cher que la voiture de monsieur tout le monde, et du coup les gens sont moins intimidés, ils s’en approchent.
La FoMoCo a vraiment réalisé un coup de génie en faisant cette voiture ! Et la qualité de boîtier rouge est sans conteste quand l’article permet de comprendre ce qui fait l’automobile aussi facilement.
Merci ! (Un lecteur berruyer)
Ah merci pour ce soutien berrichon et berruyer ! 😉
*Plymouth Barracuda, et elle est sortie juste avant la Mustang mais niveau ventes il n’y a pas photo.
Beau papier mon Paulo! C’est vrai que cette « Tang » est désirable….une vrai gueule, un bon gros moteur, pas de chichi…..à te lire, j’aurais aimé chatouiller du V8 avec toi! Car cette bagnole est à mes yeux une voiture de copains, en dehors de la chasse à la poule d’eau…tip! top!
Tu n’aurais pas su quoi faire des 421 ch mon Frédo ! 😀 Ca avoine sévère…
[…] « produit », même si c’est l’occasion de tester un modèle (lire aussi : Ford Mustang VI), et permettant de rencontrer beaucoup de gens intéressants, dans un cadre détendu. Et pour un […]
Les bagnoles US c’est le meilleur rapport qualité prix. Le pb c’est qu’elles sont assommées de taxes en arrivant en Europe ! taxe d’importation, TVA, malus débile car les bagnoles us polluent moins que les bagnoles malussées n’importe comment en France, etc.
Sinon je donnerais pas cher de l’industrie auto européenne…
Au Canada par exemple, un Dodge Caravan, équivalent à peu près à un Voyager, avec un 3.6 280 ch et non pas un pauvre diesel, ça vaut le prix qu’on achète une Clio ici…
La Mustang est en effet une belle réussite. ça fait déjà plusieurs années que ce modèle revit.
Je suis en train de la tester pour un road trip de deux semaines dans louet des usa…cest tout bonnement enorme !
[…] Entre deux verres de Sancerre, Sylvain me dit, l’année dernière, de passer quand je voulais pour en profiter un peu. 30 bornes nous séparent, et il m’aura fallu un an pour trouver le temps. Quel idiot ! Il a fallu que je cruise un peu en Mustang en direction de la Vendée pour me rappeler que mon propre cousin en avait une à deux pas de chez moi (lire aussi : Ford Mustang VI) ! […]
[…] 1970 et 2004 le cheval avait les pieds dans la boue, voire parfois jusqu’au cou (lire aussi : Ford Mustang VI). Honnêtement il fallait que l’esprit de l’originale Mustang soit terriblement fort pour que […]
[…] les ailes) rendent bien fade sa grande sœur de série la Mustang GT V8 ou Ecoboost (lire aussi : Ford Mustang VI). Les sigles Mustang ou GT qui ornent habituellement la calandre et la malle arrière sont […]
[…] doute grâce à ses défauts aussi). On en aura fait des bornes, que ce soit moi (lire aussi : Mustang VI) ou lui (lire aussi : Mustang V8 Cabriolet) mais aussi Raphaëlle (lire aussi : Shelby GT350R). […]