Pour accompagner tous ces articles de bagnoles, quoi de mieux qu’un peu de culture autour, de remise dans le contexte, de marques oubliées ou de modes passées de mode ? Pour inaugurer cette nouvelle rubrique « Et pendant ce temps là », abordons un fast food qui parlera à plus d’un nostalgique : le Free Time !
Pour les gens de ma génération (les quadragénaires en gros), les années 80 sont un peu nos années 60 à nous, une deuxième révolution que nos parents, encore baignés dans leurs années yéyé, voire psychédéliques, ne comprenaient pas plus que nos grands parents à l’époque. L’heure était toujours à la guerre froide, mais le vent semblait tourner avec l’arrivée de Reagan au pouvoir en 1980 et le début de « la guerre des étoiles » tandis que l’URSS se trouvait son Vietnam à elle en Afghanistan (les temps ont changé hein ?). Côté musique, New Wave, Ska, Punk, Hard Rock ou nouvelle pop prenaient le pas sur le bon vieux rock de nos parents : adieu les Stones et les Beatles (même si nous les écoutions toujours), bienvenu Michael Jackson, Madonna, ou Prince (pour faire court).
Etrange mélange, ces années 80, teintées d’américanisme (Converse, Vans, McDonald) et de résistance culturelle (Creeks, Chevignon, Free Time). La musique se chantait encore en français ou en allemand sans pour autant que ce soit de la soupe, et on pouvait aller dans un fast-food sans qu’il soit américain, et sans être ringardos. Le FN montait déjà, mais on était un peu plus politisé, et ça castagnait sec dans le quartier de Montparnasse et aux alentours d’Assas, entre GUD et SCALP. L’alternance avait déjà pris le pli avec l’élection de Tonton, la cohabitation s’invitait pour la première fois en 1986, les manifs prenaient des airs de Corrida avec des CRS Voltigeurs à motos, et Malik Oussekine y laissait la vie rue Monsieur le Prince. Les yuppies et autres Golden Boys à la Bernard Tapie fleurissaient, et roulaient en 205 GTI (lire aussi : 205 GTI) ou pour les plus snobs en bavaroise E30 (voire carrément en M3, lire aussi : M3 Cabriolet E30). Ce n’était plus le plein emploi comme au temps de nos parents, mais la possibilité de faire fortune sonnait à l’oreille de tous les jeunes diplômés de cette époque là.
Actuel existait toujours, épousant ce mouvement des années 80, révolutionnaire et capitaliste à la fois, tandis que les radios libres soufflaient un vent de liberté comme l’internet aujourd’hui. C’est dans ce contexte là que j’ai découvert le Freetime, que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître comme disait le « petit » Charles.

Salengro n’a pas toujours été notre Président, mais aussi l’ambassadeur de Free Time (et de Gerflor deux ans plus tard). Il est malheureusement décédé en mars 2018
Aujourd’hui, les jeunes découvrent le Burger King comme un eldorado contrant l’hégémonisme d’un McDonalds tout puissant, oubliant que la vénérable chaîne de burger est un concurrent au moins aussi puissant que Ronald aux Etats-Unis, et qu’elle a été présente en France jusqu’en 1997. Mais quand on portait des Creeks et un Chevignon, qu’on avait un Chapelier aux épaules (Eastpack faisaient encore de la figuration en France, lire aussi : Hervé Chapelier), on allait pas au McDo, mais au Freetime.
Lorsque j’étais à Stanislas, nos points de rencontres étaient évidents : le Brazza pour acheter des clopes (à l’époque à 8 balles, et je parles de francs pas d’euros), jouer au flipper, boire un demi (ou un galopin, suivant les finances), et écouter les Rita Mitsouko sur les juke box individuels installés à chaque table ! Pour déjeuner, plutôt que les salsifis de la cantine, c’était direction le Freetime à l’angle de la rue du Montparnasse et du Boulevard éponyme, en face du marchand de vinyles (et bientôt de disc laser – le CD pour les incultes –) Clémentine.
Ah le Long Burger, réponse bien franchouillarde au Big Mac pas encore hégémonique… Plutôt que le pain rond, Freetime proposait le pain long, avec une bague au milieu pour que toutes les sauces ou les aliments restent bien dans le sandwich. Pour promouvoir la marque, Etienne Chatiliez à la barre (qui nous gratifiera aussi de films comme La vie est un long fleuve tranquille ou Tatie Danièle), et notre Salengro nationale (aujourd’hui décédé), pas encore à la tête de sa Présipauté, et encore habitué à la pub et aux dalles Gerflor.
Au milieu des années 80, Freetime est une intéressante alternative, soutenue par un grand groupe, Accor, et disposant de 70 restaurant à Paris et en province. Créée en 1982, l’enseigne so eighties est un concurrent crédible. Mais la lutte est rude entre les chaînes de burgers : McDo multiplient les ouvertures, Burger King tente de résister sans y mettre les moyens, et l’insolent belge Quick, créé dans les années 70, se présente en outsider. Au milieu, Freetime manque un peu de moyens malgré le groupe Accor, et finira par se laisser racheter en 1988 par le belge Quick. Ironie du sort, Olivier Bertrand, patron du groupe Bertrand, relanceur de la marque Burger King en 2014 et prédateur de Quick peu après, a commencé sa carrière comme équipier chez Free Time.
En cette année 88, je ne savais pas encore que Free Time allait disparaître. L’enseigne se maintiendra à Paris jusqu’au tout début des années 90, pour finir par laisser place à la marque Quick plus puissante, mais autrement moins originales. Adieu Long Burger avec les copains avec Etienne Daho en fond sonore !

Big Fernand fit un gag en feintant la ré-ouverture du Freetime en lieu et place du Brazza, boulevard du Montparnasse en 2016 !
Mais voilà que le retour de Burger King pourrait bien relancer par ricochet l’iconique marque des années 80. Avec la folie du burger, et le retour du vintage, Freetime qu’on croyait définitivement enterrée fait son retour dans la cour des grands. Relancé en 2007 à Clermont Ferrand, Freetime faisait son retour à Paris en 2016 ! Mais pour relancer un mythe, il fallait en casser un autre : ce premier restaurant s’installait à deux pas de son ancien bastion du boulevard du Montparnasse (devenu Léon de Bruxelles) à la place… du mon vieux Brazza qui ferme ses portes définitivement. Merci Fastandfood.fr pour l’info (lire aussi : Freetime, le retour du Long Burger) ! Il s’agissait d’un canular, puisque derrière les affiches « Freetime » se cachaient les travaux d’un autre challenger du burger, Big Fernand
[EDIT]: pendant qu’un lecteur fidèle découvrait le pot au rose sur internet (lire aussi: Le faux retour de Free Time à Paris), je passais moi aussi, déconnecté du web, dans le quartier de Montparnasse, décidé à prendre des photos moi même de cet hypothétique Free Time. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir que le Brazza allait devenir en fait un… « Big Fernand », qui avait fait le buzz en se jouant d’un retour de Freetime… Bien joué !
Images : DR, Fastandfood.fr, et Paul Clément-Collin pour la dernière rétablissant la vérité !
25 Comments
Ah ah, tres bon article.
J étais aussi dans le 15e, mais chez le concurrent de Stan (ENC) ; on avait aussi les chapeliers (je L ai encore, solide ces bestioles), les chevignons, les creeks (ou les doc Marteens/carterpillar selon les années…) mais point de freetime. Les rues Lecourbe et Vaugirard étaient pauvres en fast-food ou fallait marcher jusqu a convention pour avoir droit à un whooper 🙂
Très bon article, sur une marque de Fast Food que je ne connaissais pas.
Fin des années 80, j’étais à l’école sur Paris et je trainais pas mal sur Chatelet.
Merci Paul pour ce moment nostalgie qui fait remonter quelques souvenirs, d’un temps où…
Excellente nouvelle rubrique de rentrée, Paul.
On se sera croisé de peu, enfin moins dans l’espace que dans le temps puisque quelques années plus tôt j’arpentai moi aussi le Boulevard du Montparnasse quotidiennement du moins dans sa partie orientale passant du XVème où j’étais affecté au XIIIème pour aller déjeuner. J’étais bidasse, troufion, appelé du contingent comme on disait à l’époque et la mission qui m’était dévolue était de coordiner les différents services au sein de la STBFT (Section Technique des Bâtiments, Fortifications et Travaux) qui sévissaient alors au 3ème niveau du bâtiment sis au 93 du Boulevard du Montparnasse, presque tout entier dédié à la DGAC (Direction Générale de l’Aviation Civile). Ainsi chaque midi je partais à pieds et passais, rêveur, devant quelques établissements parisiens réputés tels que La Coupole, La Rotonde, La Closerie des Lilas, j’en oublie peut-être, tous inaccessibles à ma solde de simple deuxième pompe, pour me rendre au mess officier de la caserne Lourcine sur le Boulevard de Port Royal, qui faisait face au Val de Grâce. Mon bonheur était d’être en civil, entouré d’officiers et de sous-officiers et d’être servi par de jeunes recrues du même grade que le mien, tous de blanc vêtus ce qui correspondait pour eux à la tenue de combat. C’était à Lourcine que je vis pour la première fois des engagées de la gente féminine, arborant une tenue impeccable, la grande muette s’ouvrait; Mais de burgers, courts ou longs, point !
Et comme on dirait ailleurs, Go BR !
😉
J’ai fait 2 ‘vernissage’ de FreeTime, celui de Bordeaux et de Metz. J’installai un système d’allumage/extinction automatique des lumières, des fours, des friteuses, … c’était bien sympa et bien bon les mini-longburger réalisés pour cette occasion.
« My teinturier is rich ! »
Signé Le Sdece
Pour comprendre pourquoi 1982 est la date charnière : MacDo est démarché au début des années 70 par Raymond Dayan pour développer la marque en France. McDo ne croit pas au marché Français et accorde une licence d’exploiration à Dayan en 1972. En quelques année, il monte près d’une dizaine de resto en France, qui sont parmi les plus profitables. Intrigué, McDo dépêche en 1977 une équipe sur place pour comprendre le miracle. Les inspecteurs relèvent les non conformité au « cahier des charges McDo » . En 78 ils reviennent monter un dossier à charge contre l’exploitation McDo par Dayan et de retour au USA lance une procédure d’annulation de la licence. Le verdict tombera en 1982, date à laquelle un tribunal de Chicago autorise McDo a annuler la licence. Le société de M Dayan étant propriétaire des restos, ils sont rebaptisés, « O’Kitch ». Il faut attendre 1984 pour qu’un premier McDo « made in USA » ouvre et que l’artillerie lourde soit lancé. C’est pourquoi Accord comprenant qu’il ne pourrait pas rivaliser, vend ses Free-Time 3 ans plus tard
Ah merci pour toutes ces infos que je n’avais pas ! Je comprends mieux certaines choses !
Je suis aussi un ancien de stan. 9 ans fermes là bas.
Mais moi j’ai du faire semblant de bouffer dans l’infect cantine tres longtemps. Ensuite je rentrais manger à ma maison. Et quelques fois, sandwich toasté pas mal du tout dans une boutique du bd montparnasse. Et puis il y avais la pizzeria tony. Les hamburgers, je suis contre par principe.
moi 10 ans…. 1981-1991… de la 11ème (oui on disait comme ça à l’époque à la seconde 😉 )…
88 a 96 en terminale
J’y suis retourné il y a qques mois, il y a eu de la demolition, reconstruction.
Et puis c’est devenu mixte !
Oui je sais bien mon neveu y est encore… 😉
Pour reprendre les termes de la pub, moi aussi, je suis omnivore, sauf qu’être fait pour manger de tout n’empêche pas de réfléchir pour éviter de se gaver de la première merde venue.Et de la merde, y’en a à foison. Y’a même surtout de ça ! C’est la raison pour laquelle, bien qu’étant omnivore, je m’abstiens d’une part de bouffer de la merde industrielle (et les fast-food en font partie) et d’autre part, ayant pour ami les animaux, je n’ai pas pour habitude de manger mes amis.
Merci donc d’éviter à l’avenir de faire de la pub déguisée pour les viandards !
Je te signale que les animaux sont les premiers a se bouffer entre eux. Aucune raison qu’on ne fasse pas pareil.
Moi aussi j’aime les animaux mais avec du sel et du poivre.
Sinon je ne pense pas qu’il y avait cette enseigne dans ma région.
1er Mc Do, tout gamin, en 1980 au Forum des Halles!
L’époque où l’on pouvait commander une « gosette » en guise de dessert, sorte de beignet fourré à la pomme ou à l’abricot.
Dans son étui en carton, la gosette restait brûlante même après avoir pris le temps de mâcher consciencieusement son Big Mac et ses frites.
Mais bon sang, qu’est-ce qu’ils utilisaient comme micro-ondes???
Puis mes années lycée s’étant déroulé à Marseille: à moins que l’auto-suggestion ait perverti mes souvenirs, je crois qu’on a eu Free-Time, ici aussi.
Au Vieux Port, à l’emplacement actuellement occupé par… Quick!
Maintenant, autour de la ville, on a 2 Burger-King, 2 Memphis Coffee, et même un Big Fernand aux Docks!
N’en déplaise aux pourfendeurs de la malbouffe, tous les restos s’y mettent de toutes façons.
Vu ce mois ci à Laguiole, dans un restau où un commis prépare l’aligot à la vue des clients: le Mac Marcel, hamburger 100% viande hachée de l’Aubrac!
Qui a dit « French paradox »?…
C’est exactement cela la culture, au lieu de dénigrer, mieux vaut proposer en revisitant le produit à sa façon. Dans un tout autre domaine, au lieu de tergiverser sur un maillot de bain à cagoule, nos élites feraient mieux d’implorer nos meilleurs stylistes modélistes à plancher sur le textile profane…
N’empêche je considère que un burger est un aliment comme les autres, alors… pourquoi pas dans un restaurant ?
Ce n’est pas nécessairement de la malbouffe, tout comme une sole à la crème n’est pas nécessairement toujours un plat « heathly » si tu mets trois tonne de crèmes épaisse par exemple… ce qui fait que un burger est quelques fois de la « malbouffe », c’est les sauces et le mode de cuisson, car sans cela ce serait presque diététique : il faut pas oublier après tout que c’est juste un pain avec de la viande (ou pas) et des crudités, donc rien de différent d’un steak haché commandé en brasserie !
A vrai dire la conception de frontières de la nourriture n’existe pas réellement : tu peux proposer un plat « style burger » dans un restaurant huppé en le réinventant, tout comme tu peux servir des plats mijoté mais selon le format « fast food » ! (et d’ailleurs je connais un restaurant africain à Paris qui a tenté ce pari de proposer de la nourriture traditionnelle mais servi vite et que c’est méchamment bon !)
Chacun mange ce qui lui plait, et rien n’empêche de piquer dans l’assiette du voisin pour utiliser la métaphore 🙂
C’est pas un maillot c’est un costume complet. Avec un burquini on pourrait faire 500 strings, quel gaspillage. Et tres mauvais pour les vendeurs de creme solaire.
… donc bon pour la planète…
🙂
Le seul intérêt de la plage c’est regarder les nanas.
Le Burkini c’est comme aller au salon de l’auto pour voir des bagnoles bâchées. Aucun intérêt,
C’est marrant dans mon souvenir le freetime était à la place du mustang, mais bon MOI j’étais encore jeune quand il a fermé ! 🙂
J’ai si souvent garé mes cox sur le bateau à gauche du brazza pour acheter les clopes le dimanche dans les années 2000.
Super cette nouvelle rubrique !
Dans les années 80, bah …. Mes parents devaient même pas avoir conscience de mon existence, mais ma mère écoutait Madonna et mon père a souvent changé de coupes de cheveux ^^
Salut Paul,
après une longue absence, je reviens ici!
Article intéressant et ça détend un peu… Même si j’avoue qu’étant de 1982, je n’ai donc pas vraiment connu Free Time, les années 90 étant (niveau musical) un mélange pour moi de sons 80s et d’électro-techno disparues des ondes pour la plupart depuis (même si certaines chansons reviennent ces temps-ci revisitées!)!
Bonjour,
il s’agissait d’un fake :http://www.snacking.fr/news-2993-Canular—Big-Fernand-s-amuse-d-un-vrai-faux-retour-de-Free-Time.php
Désolé pour les nostalgiques
Oui je suis passé mercredi devant, et ce sera un Big Fernand, j’ai pris la photo justement 😉